Entrainement : Toutes les astuces pour rouler dans le vent

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Comment lutter contre le vent


Cette force invisible qui peut rendre nos sorties, courses ou randonnées très désagréables, fait partie intégrante du sport cycliste. On ne peut rien contre le vent, si ce n’est apprendre à déjouer les pièges qu’il tend, ou à s’en servir pour tenter de mettre en difficulté l’adversaire.

Crédit photos : Sylvain Pigeau

Les progrès de la météo permettent de prévoir à quelque chose près le temps qu’il va faire, ainsi que l’intensité du vent, et surtout sa direction. Nombreux sont pourtant les cyclistes, confirmés ou occasionnels, qui sont démunis face à ce souffle qui déstabilise, autant qu’il peut rendre fou. Certaines régions sont plus ou moins défavorisées par les caprices d’Éole, selon le relief ou le courant maritime qui domine. Mais il existe tout de même des lieux privilégiés où le vent s’exprime avec plus de facilités, des plaines du Nord à celles de la Beauce, des marais Poitevins ou Vendéens à la vallée du Rhône, les cyclistes doivent savoir composer avec. Il est très décourageant de se battre seul face au vent, de vaincre cette puissance invisible qui nous ralentit sans que l’on puisse exactement matérialiser la difficulté, au contraire d’une côte à fort pourcentage. Il est en revanche très grisant de se sentir porté par le vent, surtout lorsque le trajet d’entraînement a été bien calculé, avec un retour favorable qui permet de finir avec de bonnes sensations de vitesse. Mais le vent peut s’avérer aussi très dangereux pour celui qui ne maîtrise pas et ne comprend pas ses effets. Dangereux parce qu’un vent fort et en rafale peut faire chuter un cycliste. Périlleux également sur le plan sportif et vos potentialités à faire le résultat escompté, puisque un mauvais placement au mauvais moment peut tout gâcher. Avant toute chose, il est nécessaire de se donner une idée comptable des effets du vent de face.

Une difficulté à part entière

Lorsqu’un bulletin météo indique la force du vent (en km/h), celle-ci est prise à 10 mètres du sol. Un cycliste peut diviser par deux le réel effet du vent contraire sur sa progression. Ainsi, si le vent souffle à 40 km/h selon météo France, on le ressent en réalité à 20 km/h. C’est toutefois suffisant pour limiter considérablement la progression. Selon la position adoptée sur le vélo, entre les mains en haut du guidon et une posture de rouleur contre la montre avec les mains sur le prolongateur, le coefficient de pénétration dans l’air passe d’environ 0,43 à 0,25. Autrement dit, on économise 30 watts à 30 km/h dans cette configuration. Reste qu’avec un vent de face ressenti à 20 km/h, il faut donc déployer entre 40 et 70 watts supplémentaires pour rouler à 30 km/h, par rapport à des conditions de vent nul. Si le vent ressenti est de 50 km/h, on passe à une résistance de 255 à 440 watts, toujours pour rouler à 30 km/h. Nous avons donc tout intérêt à adopter une position la plus aérodynamique possible, et à rouler en groupe. Car en adoptant la technique des relais, il est possible d’économiser de 20 à 30% d’énergie selon la position dans le groupe grâce à la protection offerte par les cyclistes qui précèdent.

Une composante du vélo

La présence ou non de vent doit être considérée comme un élément déterminant de toutes les épreuves cyclistes. Avec un peu d’habitude et de connaissance de soi, le vent se gère s’il ne s’agît que d’entraînement en solitaire. Il suffit alors de l’intégrer dans la difficulté du parcours choisi, et relativiser ses effets défavorables ou non. Mais lors d’une épreuve, quel que soit le niveau, le vent peut se révéler bien plus dévastateur qu’une succession de côtes. Il est évident que plus la vitesse moyenne de l’épreuve augmente, plus le vent joue un rôle déterminant. Mais souvent, la puissance des cyclistes concernés va de pair avec la moyenne générale de l’épreuve. Bref, savoir se mouvoir au sein d’un peloton les jours de grand vent, cela s’apprend plus ou moins jeune, selon si l’on a été exposé ou non à ce genre de difficulté dès les premiers tours de roues. Les jeunes Belges ou Hollandais savent très tôt s’organiser face aux caprices du vent. C’est une question de culture. Plus le niveau de la course augmente, plus le nombre de compétiteurs qui savent se placer et s’organiser par rapport au vent est important. Le but du jeu étant bien entendu de ne pas forcément arriver tous ensemble sous la banderole, tous les moyens sont donc presque permis pour tenter de disloquer le peloton. La force du vent et sa direction doivent toujours faire partie de vos préoccupations principales avant le départ d’une épreuve. Sur une course en ligne, il est impératif de repérer sur une carte le parcours, ainsi que la direction du vent. Il faut mémoriser ou noter les endroits où vont se produire les principaux changements de direction. Un petit sparadrap collé sur la potence avec les indications principales peut se révéler un allié précieux. Si l’idée principale peut souvent être de rester à l’abri le plus longtemps possible avant de produire l’effort décisif, il faut procéder tout autrement à l’approche des principaux changements de direction. Plus le peloton est important, plus il est nécessaire de pouvoir se placer dans les premières positions avant de virer de bord, de manière à éviter les cassures. Une difficulté technique qui intervient toujours lorsque le vent souffle de côté.

Le bon éventail

Un minimum de notion cycliste suffit à comprendre comment se relayer lorsque le vent vient de face. Dans le cas où l’on appartient à un groupe plus ou moins nombreux, et dans le cas où tout le monde ou presque souhaite la bonne progression du groupe, il est facile de mettre en œuvre des relais simples. En gros, le coureur de tête affronte le vent de face durant quelques centaines de mètres pendant que ses compagnons profitent de son sillage pour récupérer. L’abri ainsi proposé permet à tout le monde de produire un effort plus violent. Chaque cycliste accomplit donc sa part de travail, puis retourne à la fin de la file dans les roues, pour à son tour récupérer et reprendre son relais quelques kilomètres plus loin. L’organisation du groupe est sans failles si tout le monde joue le jeu, mais peut devenir problématique à partir du moment où l’un ou l’autre refuse de collaborer pour uniquement profiter du sillage des autres concurrents. On peut noter d’ailleurs que ce type d’organisation est aussi valable avec le vent dans le dos, puisque la résistance à l’air est augmentée de façon exponentielle avec la vitesse. Ainsi, se relayer à 60 kilomètres à l’heure vent favorable est aussi difficile que 20 Km/h moins vite vent de face.

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Vent de côté, de trois-quarts face ou de trois-quarts dos, le principe est sensiblement le même, sauf que chaque coureur se décale légèrement par rapport à celui qui le précède. Il n’y a qu’à observer les oiseaux migrateurs pour remarquer leur organisation. Mais si dans le ciel, la largeur de ce qu’on appelle l’éventail peut être infinie selon le nombre d’oiseaux, sur la route il en va tout autrement puisque celle-ci est limitée. Si le coureur de tête se positionne d’un côté de la route, il est donc facile d’imaginer que le nombre de coureurs abrités sera donc limité, puisque chacun sera décalé par rapport à l’autre. Selon la largeur de la route et le nombre de coureurs, tout le monde n’est pas protégé. Pour aller encore plus vite, l’éventail peut s’organiser en double éventail, c’est-à-dire qu’il y a une file de coureurs décalés qui monte pour que chacun aille prendre son relais et affronter le vent, et l’autre file de coureurs décalés aussi qui est constituée de ceux qui viennent de faire leur part de travail. Ce genre d’organisation en tête de groupe a vite fait de mettre en difficulté ceux qui ne sont pas intégrés à l’organisation. Les coureurs non abrités se retrouvent en file indienne dans ce qu’on appelle la bordure. Comme une route est rarement totalement droite, que le vent peut souffler en rafale, ajoutant ainsi à l’instabilité de la situation, que les relances sont fréquentes, il se produit un inévitable effet élastique dans la bordure, si on est éloigné de l’éventail. Les cassures sont donc inévitables. Au sein même de cette file indienne, certaines places sont même un peu plus appréciables que d’autres. Il suffit d’être placé juste derrière un coureur mal habile, mais costaud si possible, qui roule légèrement décalé par rapport à la file indienne elle–même très proche du bord de la route, pour profiter d’un très léger abri supplémentaire. On constate souvent d’ailleurs qu’un coureur sur deux au sein de cette file indienne est très légèrement décalé, tout simplement parce qu’il n’y a plus de place sur le côté, et parce qu’il faut bien regarder ce qui se passe devant. Tout l’art du spécialiste consistera donc à toujours se placer dans cette situation périlleuse derrière un coureur lui-même un peu décalé, quitte à perdre quelques places volontairement pour trouver le bon.

Bien sûr, il existe de nombreuses variantes à cette situation. On peut imaginer que les coureurs de l’éventail se jugent trop nombreux, et souhaitent donc éliminer quelques indésirables. Il leur suffit donc de resserrer leur ordre de marche, afin de mettre plus de coureurs en difficulté derrière. On peut aussi voir une équipe très bien organisée, connaissant parfaitement les lieux, monter un coup en accélérant aux abords du changement de direction. Les dégâts sont souvent conséquents car aucun coureur de tête ne se pose de question. D’ailleurs, un coureur a toujours tout intérêt à collaborer dans un éventail. D’une part pour ne pas le désorganiser si il a la chance d’y appartenir, et d’autre part pour ne pas faire partie de ces indésirables que l’on tentera de mettre à nouveau dans la bordure à la première occasion. Il faut bien sûr rester toujours vigilant, même au sein de l’éventail, car en cas de nouveau changement de direction, si la route est subitement moins large, il n’y a plus de place pour tout le monde. Voilà pourquoi certains éventails s’amenuisent au fil des kilomètres.

Dur pour tout le monde

Physiquement, ce genre de situation est difficile pour tout le monde. L’analyse des courbes cardiaques lors de ce genre de course montre une sollicitation physiologique équivalente à de la moyenne montagne. Mieux vaut donc collaborer, et garder le contact avec la tête lorsque c’est possible. Dans les courses de très haut niveau, rares sont les coureurs qui restent dans la bordure sans réagir. L’instinct et l’expérience incitent à ouvrir un deuxième éventail, voire un troisième. Le but étant de conserver le contact, à une centaine de mètres du premier éventail, tout en s’organisant. Il ne faut donc pas hésiter à exhorter les adversaires qui se situent dans votre périmètre à collaborer avec vous pour former l’éventail suivant. C’est votre seul chance de revoir la tête quelques kilomètres plus loin. Attention à ne pas rester trop près du premier groupe, ce qui risquerait d’inciter des coureurs de votre éventail de tenter leur chance pour boucher seuls le trou. Ce qui bien sûr désorganiserait votre bel ordonnancement.

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Ces faits d’armes sont plus rares lors d’une cyclosportive. Le nombre de cyclistes expérimentés étant trop faible pour réellement jouer avec les éléments. Cependant, il peut être très important de s’inspirer de ces situations ne serait-ce que pour prendre place au sein du bon paquet. Celui qui vous permettra de gagner plusieurs dizaines de minutes sur un temps de référence.

Se placer

Le bon placement revêt toute son importance à l’abord des difficultés. Mais il est toujours possible de remonter à l’avant du peloton  dans les premiers kilomètres d’un col par exemple, si l’on est vraiment costaud. Ce qui ne suffit pas la plupart du temps sur le plat lorsque le peloton se morcelle. Il est donc impératif de repérer le parcours à l’aide d’une carte détaillée avant le départ. Il faut juger de la force du vent, mais surtout de sa direction. Il est nécessaire de noter le nom des villages qui peuvent servir de repère. Et toujours remonter dans les premières positions avant le changement de direction. Dans les pelotons cyclosportifs, faire l’effort en prenant un peu de vent suffit largement. Ces efforts ne sont pas gratuits, puisqu’ils sont capitalisés par le fait d’appartenir au bon éventail. Plus le niveau des épreuves ou compétitions est élevé, plus le nombre de participants à vouloir tenter la même opération est important. C’est là que l’on assiste très vite à une foire d’empoigne pour tenter de gagner des places. C’est ce qu’on appelle frotter, jouer des coudes, sentir la bonne vague, ne pas se faire enfermer, comme lorsqu’on aborde un sprint. Certains sont experts dans cet art d’équilibriste et de « pousse-toi-de-là », même si les mauvais gestes sont rares finalement. Mais c’est aussi ce qui occasionne des chutes, d’autant plus nombreuses qu’il y a de l’enjeu. On ne se meut pas dans un peloton aisément lorsque l’on a des appréhensions, que l’on se sent enfermé et que l’on craint la chute. Et surtout, le fait de ne pas être un compétiteur né peut faire cruellement défaut. Il va de soit que les jours de grand vent, le matériel choisi a aussi toute son importance. Des roues à jantes trop hautes font perdre de la maniabilité. Même les cadres aux tubes surdimensionnés peuvent poser problème en cas de fort vent latéral. Au niveau vestimentaire, il est essentiel de porter des vêtements ajustés, ne serait que pour l’économie d’énergie que cela peut apporter.

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Pour ceux qui s’en tiennent à quelques cyclosportives par an, ces quelques explications sur la bonne organisation face et contre le vent peuvent suffire pour mieux appréhender ce type d’épreuves. Ne pas se laisser surprendre et savoir pourquoi le vent est si important dans la composante des résultats d’une épreuve, c’est déjà un plus indéniable.

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